jeudi 14 décembre 2006

Sexus, Henry Miller, Paris, 14 décembre 2006

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Premier tome de la Crucifixion en rose, l’autobiographie épaisse de Henry Miller, Sexus relate la période allant de la rencontre de Mara jusqu’au mariage avec Mona (la même personne rebaptisée en cours de route) avec quelques sauts en avant ou en arrière dans le temps, au gré des rencontres. Toute l’existence de Miller semble se dérouler au gré des rencontres, en suivant les envies qui viennent sans jamais laisser s’interposer la moindre limite morale.

À cette époque (1924), Miller a 33 ans, un poste enviable de DRH à la compagnie cosmodémonique des télégraphes et met peu à peu au clou son fantasme d’écriture. Il hait sa femme Maude avec application, semble ignorer sa petite fille (ou refuse d’en parler par pudeur ?), pochetronne et baisouille au gré des rencontres. Un soir au dancing il tombe sur Mara, une entraîneuse, et tombe raide amoureux. Mystérieuse mythomane comme lui toujours à court d’argent, elle semble pouvoir faire contrepoids à son inconséquence par une folie encore plus radicale. Miller divorce, ce qui sonne le démarrage d’une vie sexuelle d’une intensité totalement inédite avec Maude, sans que cela remette une seconde en question l’amour viscéral qu’il porte à Mara (devenue Mona alors que lui devient Val). Ils emménagent ensemble à Brooklyn dans une location hors de prix en empruntant tout ce qu’ils peuvent et se marient. L’épisode finit en légère dérive mentale à la fin de la journée du mariage.

Ici on a clairement affaire à un monstre : de littérature, d’égoïsme, de franchise, de liberté, de frime et de luxure. Le genre qui peut pas croiser une femme désirable sans l’emmancher et qui procure (ou croît procurer) 14 orgasmes à toutes celles qu’il honore de son pénis des plus réactifs. Le style est phénoménal, jubilatoire, avec des cascades d’images percutantes et incroyablement originales. Il n’a pas son pareil pour provoquer des triques violentes dans le métro, dont l’ingrédient excitant est clairement la transgression. Rien ne le fait reculer : baiser la femme d’un copain, son ex-épouse effondrée, la voisine adolescente, une Irlandaise moche en retour de cuite. Miller ne se sent tenu à aucun engagement vis-à-vis de qui que ce soit, fusse Mona. Il n’éprouve aucune culpabilité pour son absence de tristesse le jour où elle tente de se suicider au moment où il était en pleine fornication avec Maude, n’a aucune intention de payer les pensions alimentaires (alors même qu’il demande à payer double au tribunal). Il ne prétend pas à la vertu, ni à aucune fiabilité, et ce sans malignité (sauf exception ludique). Cet individualisme radical choque encore le lecteur de 2006 alors que le récit date de 1939 et relate des faits de 1924, si du moins le lecteur, pourtant prévenu, a la crédulité de croire sur parole les vantardises de l’auteur. Miller est enfin un monstre de bavardage qui dure plaisamment et brillamment cinq pages, multipliant les anecdotes à l’énergie, là où l’écrivain moyen semblerait s’appesantir au bout d’un paragraphe. Quelques longueurs psychédéliques auraient pu être élaguées, mais au plus une centaine de pages sur les quelques 650 de ce premier tome. Reste à tenir le rythme sur le millier qui suit.

6 commentaires:

Camille a dit…

Terminé hier. Effectivement l'utilisation des images est incroyable. Elles m'ont fait tantôt mourir de rire, tantôt pleurer. Il faut s'accrocher sur ces 670 pages dont on se demande si cela finira un jour. Livre superbe et insupportable! Fin décevante ;-(

Random a dit…

Tout juste terminé;Miller est un monstre tout simplement, un vrai artiste. il parle à tord et à travers parfois, saute du coq à l'âne mais il vous envahit par ses idées ses histoires interminables.
il est aussi d'une sincérité inégale.
il fascine par son narcissisme.
j'avoue aussi que sa description des choses, ses images sont d'une extrême précision, ces images jaillissent de vie.
c'est un type d'une folie extraordinaire que l'on ne peut qu'admirer.

Anonyme a dit…

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