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« Allah n’est pas obligé d’être juste dans toutes ses choses ici bas. » C’est le refrain de cette ballade tragique, ponctuée de « Faforo (bangala du père) ! » et de « Gnamokodé (bâtard de bâtardise) ! », qui voit l’enfant soldat Birahima errer en compagnie du Grigriman Yacouba à travers les guerres tribales du Liberia et de la Sierra Leone, à la recherche de sa tante Mahan qui a été désignée pour l’éduquer à la mort de sa mère.
C’est un livre d’enfant, sur le mode de L’attrape-cœur ou de La vie devant soi, qui narre avec naïveté et fatalité trois années d’une litanie d’atrocités, avec en prime une ambition polyglotte très réussie dans la mise en œuvre (la traduction ou la définition des mots français français, français d’Afrique ou pidgin est indiquée entre parenthèse directement dans le texte) mais sans trouver vraiment de fondement dans le personnage de Birahima (sauf qu’il a hérité de dictionnaires). Tout comme les récits et analyses politiques sont bons mais surprenants dans la bouche d’un enfant soldat.
Le récit est répétitif et lancinant, des phrases similaires revenant autant de fois que les mêmes situations se présentent : « Le camp militaire était limité par des crânes humains portés par des pieux. Ça c’est la guerre tribale qui veut ça. » La galerie de portraits des chefs de bande rencontrés est d’une grande constance dans le sadisme et la folie paranoïaque et sanguinaire, avec peut-être une mention spéciale pour Foday Sankoh, le chef des RUF de Sierra Leone, qui projeta de couper les mains de tous les citoyens (« manches courtes » ou « manches longues » selon l’inspiration) pour empêcher la tenue d’élections démocratiques ou encore imposait aux enfants désireux de devenir enfants soldats (poste envié pour la bouffe, la drogue et parfois même le salaire) de commencer par tuer leurs propres parents pour prouver leur loyauté. Les oraisons funèbres d’enfants soldats se suivent et se ressemblent. La crédulité des Africains et leur docilité vis-à-vis de chefs ne respectant aucun principe sont atterrantes et Kourouma a le grand mérite de ne pas les édulcorer. Seul Birahima semble douter (ponctuellement) de l’efficacité des grigris anti-balles… Birahima qui d’ailleurs passe sous silence ses propres turpitudes, comme s’il n’avait aucune conscience de ses actes d’enfant soldat…
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