samedi 3 mars 2007

Rose de pierre, Anne Bragance, Paris, 3 mars 2007

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À l’opposé de La chambre des officiers, le niveau littéraire de ce petit livre écrit à la 1ère personne est en complet décalage avec les 13 ans, même éclairés, de la narratrice. Pas que ce soit merveilleusement écrit en plus, tout juste pas mal, si bien qu’Anne Bragance semble prétendre abusivement, planquée derrière son personnage de petite fille, à la virtuosité littéraire. Le récit, desservi donc par un niveau de langue inadéquat, est lui-même très inégal, extrêmement dur dans les parties intéressantes, molasson cul-cul façon comptine dans les passages ennuyeux.

Rose T. est blonde, grosse et dévorée par un psoriasis récurrent. Elle subit les foudres de sa mère acariâtre, qu’elle dénomme Madame T., pied-noir raciste abandonnée par son mari et qui croît avoir tout sacrifié pour sa fille. Pour ne rien arranger, Madame T. est aussi son professeur principal et la flique à mort. Rose a rencontré sa seule amie, Souade, au basket quelques mois avant le drame. Elle trouve enfin de l’amour et de la tendresse chez cette amie et sa famille, mais sa mère décide, lorsqu’elle s’en rend compte, d’envoyer Rose en pension loin de Vénissieux, à Valence, dès le lundi suivant. Au cours d’une expédition photographique sur le toit de la tour de Souade, évacuée pour procéder à sa destruction (longues platitudes sur la violence du déracinement pour les habitants de ces tours), Rose pousse Souade dans le vide et la tue. Le juge n’arrive à lui arracher quelques mots qu’au bout de huit semaines, et le livre se conclut par sa question : « Est-ce que les morts nous pardonnent, Monsieur le juge, est-ce que les morts nous aiment ? ».

Voici mon interprétation personnelle, d’une subtilité psychologique pas piquée des vers : écartelée entre l’amour de sa mère et l’amour de Souade, Rose T. avait cru entrevoir une porte de sortie en accomplissant la séparation exigée de la première, en figeant la seconde dans sa soif d’absolu (« si je tombe, je m’envolerais vers l’Algérie ») et en gardant prés d’elle, dans la mort, son amie, sa seule amie… Pas mal donc, mais les fils sont gros et le ton moral pas très fin.

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