vendredi 26 mai 2006

La domination du monde, Denis Robert, Noirmoutiers, 26 mai 2006

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Denis Robert est un journaliste un peu braque, indépendant franc-tireur s’attaquant depuis des années aux scandales financiers, c’est notamment lui qui est à l’origine de l’affaire Clearstream et du fameux listing de comptes, remis à Imad Lahoud qui l’aurait trafiqué. A la lecture de ce roman étrange, alambiqué, où le narrateur se voit confier par Yvan Klébert (alias Denis Robert) la mission d’écrire un livre sur son enquête et les raisons de son peu d’échos, on finit par se demander si en désespoir de cause Denis Robert n’a pas lui-même balancé le listing truffé de nom de personnalités pour que l’on s’intéresse enfin à Cleartream.

La vraie déception du livre, c’est la faiblesse des explications techniques sur les manipulations financières. Denis Robert s’en tient à des généralités (des transactions sont effacées ce qui permet d’effectuer toutes sortes de trafics sans laisser de traces) et dérape souvent en incantations outrées et répétitives. Même s’il s’efforce de ne pas céder aux sirènes de la théorie du complot ou à la dénonciation d’une machination organisée, il finit quand même par désigner l’église de scientologie comme l’autorité suprême de la Shark Company (alias Clearstream). Malgré ce bémol et un style d’écriture franchement perfectible, la mise en scène de la schizophrénie de l’auteur, écartelé entre l’attitude du chevalier blanc irréprochable (Yvan Klébert, qui s’en tient aux faits, qui sacrifie toute vie personnelle et ambitionne de changer le monde par la vérité) et celle du romancier sans illusion (le narrateur, qui invente des scènes pour illustrer son propos et voit avant tout dans son enquête une occasion de retrouver le goût du combat) est étonnante et intéressante, de même que la satyre du monde médiatique et financier (Le Monde, Edwy Plenel, Roman Abramovitch (moins crédible) en prennent pour leur grade, de même que Minkovsky, consultant multicarte dans lequel on devine sans peine Alain Minc).

Ça se dévore en tout cas et ça a le mérite de questionner le mutisme des médias sur la haute finance et ses coups tordus, ainsi que l’absence d’intérêt des foules pour les mécanismes avec lesquels on les entube.

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